Vunion Lautrec, chapitre 6 [110]

Mais soudain il sentit un pic.
Très piquant. Il fut blessé dans son amour propre qu’il retourna, le maintenant aux épaules, et serra au cou. Il suffoqua. C’est à ce moment qu’il put se focaliser sur le pic piquant : la lance de son espadon empaillé. Il avait oublié jusqu’à son existence, malgré les bons moments passés ensemble. Il balaya la nostalgie d’un revers du front et le sortit de la fine boue qui l’avait à demi enseveli.

C’est là qu’il retrouva son livre rouge. Soussur l’espadon. Mais comment aurait-il pu retrouver un objet, accolé à un autre dont il n’avait plus le souvenir ? Il remercia la providence et tira l’ouvrage d’un coup sec.

Quelle drôle de sensation. Cet objet lui était tellement proche et éloigné à la fois, la scène lui parut irréelle. Les souvenirs étaient si nets, si brillants qu’il n’avait pas besoin d’ouvrir les yeux pour matérialiser le livre. Si bien qu’en le tenant dans la paume de sa main, sa main devenait un souvenir, et par extension lui aussi. Il était tiré hors de lui et le visage écrasé face à un miroir, dans le même instant.

Toutefois, à force de le tripoter, de le caresser, de l’observer sur toutes ses coutures, il lui rendit son aspect trivial et put se retrouver lui-même. Une dernière réminiscence de souvenir lui rappela alors le fonctionnement du livre rouge qui ne s’ouvrait pas par la tranche, mais par une grosse couture verticale sur la couverture. Il y enfonça la main.

Il faut en tirer le maximum, souffla-t-il à travers les gouttes de pluie qui lui tombaient du pommeau de la douche.

L’intérieur était noir, sec, inerte : du vide. C’est ce qu’il cherchait. Etrangement, il sentit aussi…

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Coline m’a inspiré

ZOUILLE

La gazelle se sent traquée, elle se réfugie entre des buissons où perlent quelques gouttes musquées. L’angoisse fait monter son rythme cardiaque et ses veines se remplissent d’adrénaline. Elle ne fait pas attention au doux parfum qui plane dans l’air. Ses fines oreilles se redressent, à l’affût du moindre bruit.

Le cougard a pris possession de la savane, les derniers oiseaux s’envolent au loin, leurs ailes font des mouvements saccadés. Les yeux du félin se rétrécissent, prêt à repérer le moindre souffle d’air. Ses narines s’élargissent et sélectionnent avidement les molécules en suspension. Sa tête pivote instantanément sur sa droite.
La gazelle ne supporte plus l’attente ni le silence, alors elle s’élance et soulève la terre sèche qui forme une fine fumée où ses sabots frappent le sol. Ses longues pattes fuselées se déplient avec agilité, elle rebondit en souplesse.

Le cougard, comme une ombre, bande ses muscles et jaillit. Il n’a plus besoin d’être furtif. Sa puissance s’exprime alors par des mouvements chaloupés. Les griffes de ses pattes grattent la terre et laissent de fins sillons. Son pelage s’hérisse le long de sa peau épaisse.
Les deux silhouettes animent la savane qui semble déserte. La gazelle fuit dans les herbes sèches qui lui frottent les flancs. Sous l’effet de surprise le cougard est distancé mais rapidement il revient à hauteur de sa proie.

Bientôt il va lancer ses lourdes pattes en avant qui s’abattront sur le dos de sa victime. Les griffes transperceront la chair tendre qui libérera un sang tiède. Elle trébuchera et s’effondrera.

La salive s’écoule déjà des babines du fauve. Il doit la ravaler immédiatement car la gazelle a fait une embardée qui l’a semé légèrement. Encore un effort et ses crocs pourront déchirer la peau de l’animal, le rouge se répandra sur le pelage sombre de son museau. Il sent de nouveau l’odeur de la sueur de sa proie, signe imminent de la capture.
Le cougard s’écroule.
La gazelle disparaît dans des fourrages.
La fumée soulevée par la chute retombe avec un silence pesant.
La savane est immobile.
La respiration du félin ralentit. Il aperçoit de gros nuages cotonneux accrochés dans le ciel, ils deviennent rouges. Ses yeux se remplissent de sang, puis sa gueule. Les nuages virent au noir, l’animal se détend. Une fine pointe est plantée dans son épaule. Les herbes alentour baignent maintenant dans le liquide ocre.
Le cougard ferme les yeux et laisse échapper un dernier souffle. C’est alors qu’une nouvelle silhouette sort de l’ombre d’un arbre. Petite et vive, elle se faufile entre les touffes végétales.
Elle se redresse en atteignant la bête inanimée et d’un geste rapide et précis arrache la pointe. Ce n’est pourtant qu’une petite fille noire aux cheveux tressés, mais son regard est celui d’un prédateur. Elle a perçu plus loin une présence parmi la végétation et se met sur le qui-vive.
La gazelle la regarde, elle a sortit sa tête d’un fourré. Une communication tacite s’établit. Le temps s’est arrêté.

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Vunion Lautrec, chapitre 5 [101]

Cependant, malgré le désordre ambiant, et quand même au bout du chemin, il s’évertua à retrouver l’ouvrage qu’il cherchait. C’était un petit livre, de ceux qui passent inaperçus, un format quasiment carré, une couverture rouge foncé en carton plastifié, une tranche ni trop fine ni trop épaisse qui permettait de le tenir fermement dans la main, de sentir la matérialité du livre, sa masse parfaitement équilibrée.

Flell repoussa du pied des cubes de couleur, qu’il ne se souvint même pas avoir possédés, à aucun moment de sa vie, et tomba sur une revue passionnante. Il la sortit du lac d’humidité qui avait collé les pages et essuya la mousse qui se propageait sur l’illustration de couverture. Détail amusant : la mousse poussait justement là où la femme sur la photo avait rasé sa mousse naturelle.

Il consulta le sommaire et se félicita d’avoir un tel magazine. Avant de se référer à l’article sur le fonctionnement des oreillettes, il se prit un peu au jeu du poster central et utilisa de son huile de coude.
Calmé et heureux il ne lut que la moitié de l’article pour se remettre en quête du livre rouge à la surface du marécage. C’était plus la moiteur et la sueur rendant ses mouvements lents et inefficaces que le fatras d’objets qui l’empêchaient d’arriver à ses fins. Mais soudain il…

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Bouli Lanners dans la Darasse, en vrai

Alors là, une vraie star dans la Darasse, qui l’eu cru. Bouli Lanners messieurs dames, l’acteur/réalisateur Belges a accepté de jouer pour nous. D’une patience et gentillesse infinie. Gros merci monsieur.
 
Il s’agissait du festival 5 jours tout court, pendant lequel Bouli Lanners était venu présenté un film. Et aussi car son premier long métrage Ultranova sortait en salle, notamment au cinéma Lux où le festival avait lieu. Toujours est-il qu’il avait accepté de lancer le premier Marathon du court métrage de Caen, en présentant le thème: LABORATOIRE.
 
Ni une ni deux, Timothée propose de le prendre en guest. On lui demande s’il a le temps de participer à notre film, il répond oui, d’ici 20 minutes. Parfait, ça nous laisse le temps de prévoir les plans, afin de le libérer au plus vite. Ce qui m’a le plus marqué, c’est quand Bouli a écarté une indication de jeu et imposé la sienne. Là j’ai eu la sensation d’être un enfant et qu’il était un daron. En tout cas ça s’est super bien passé.
Comme le film était plus long que les 3 minutes autorisées, hors générique, nous avons trafiqués la fin pour faire débuter ce générique aux 3 minutes et ne pas être disqualifiés. C’est dommage pour le film, il mérite peut être un remontage.
 
En tout cas, pour cette première édition du Marathon du court métrage, j’ai gagné. Mais avec le film que j’avais réalisé tout seul.

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La darasse métaphysique

Les origines de cette Darasse me sont floues une fois de plus. Je me souviens par contre qu’il s’agit de l’époque où je faisais mon expérience « oreilles de Shrek » que je portais en permanence. Sur le plan à 2’08, au montage, j’ai réalisé que mon expérience me créait un trou dans les cheveux ! J’ai arrêté immédiatement.
 
Même si je ne me rappelle pas pourquoi nous sommes parties sur cette histoire, j’ai un souvenir plutôt précis des sensations. Surement car le film est très sensoriel justement. Il me plait toujours.

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J’ai participé au 1er marathon du court de Caen

Le festival du court métrage 5 jours tout court, à Caen, fût l’occasion cette année de faire participer les locaux d’une nouvelle manière. En plus d’être spectateur, un concours permettait de participer. Ouvert à tous, il fallait réaliser un film en 48h, sur un thème donné.
Voici donc ma participation. Qui a plu visiblement, puisque j’ai gagné. Héhé.

La thématique était: Laboratoire.

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Vunion Lautrec, chapitre 4 [100]

Comment n’avait il pu le remarquer d’emblée ? Avec son entraînement, sa formation intensive ? Décidément, tout allait de travers. Ce qui le frappa le plus, c’est qu’il avait réussit à identifier l’oreillette, sur le moment, mais que son cerveau n’avait libéré l’information consciente, qu’après les événements. C’est comme si une partie de son esprit lui refusait certaines données, et qu’elles ne remontaient que très lentement jusqu’à lui.

Arrivé dans son hall d’entrée, Flell gravit les merches de klocks 3 à 3. Il escalada une crotte de dahu posée devant la portière de sa chambre, descendit en rappel de l’autre côté et attrapa la clenche. Fugacement il vit le réseau électrique de son appartement, comme un schéma technique. Il ouvrit la porte.
Avec difficulté, car sa moquette était toute gonflée à cause de l’humidité qui provenait de l’appartement du dessus. Kuka, son voisin, était rapiculteur. Et de nombreuses fuites de sulfure-horizontal longeaient les murs jusqu’au sol. Après 25 minutes d’efforts répétés, il réussit à faire passer sous la porte l’épais tapis de mousse qui gondolait, et entra. Le sol, jonché d’une multitude de petits objets, était devenu la maquette d’une ville hétéroclite. Partout, de mini bonshommes et de mini véhicules de transport recréaient des scènes quotidiennes triviales. En outre, les tensions exercées sur le revêtement y avaient dessiné un paysage de collines vertes qui cernaient la ville. Cependant, malgré le désordre ambiant, et quand même au bout du chemin, il …

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Une darasse grammaticale

Les articles sont écrits pour mon nouveau site, en 2016. J’avoue que 11 ans plus tard, je ne me souviens plus de tout. Timothée, si jamais tu lisais ceci, peut être que tu peux éclairer nos amis sur les origines de cette Darasse. On traînait chez toi surement, et on a du commencer à jouer avec un dictionnaire…

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